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Journal désenchanté
11 mars 2012

Retrouvailles (1ère partie)

La journée d’hier fut marquée par mes retrouvailles avec Anthony, Nina et Julie, les trois amis avec qui j’avais passé les années de prépa, et que je n’avais pas vus depuis plus de deux ans. Je n’avais, en effet, maintenu aucun contact depuis la fin de mes études, étant donné la honte et le sentiment de malaise que j’éprouvais à révéler le fait que je n’avais rien fait du tout durant cette période. Nina m’avait envoyé à plusieurs reprises des SMS me demandant de mes nouvelles, auxquels je n’ai trouvé le courage de répondre qu’après une longue période, réponse qui s’est concrétisée sous la forme une lettre Word dans laquelle j’avais tenté d’expliquer ma situation le plus sincèrement possible, comme une sorte de confession, au risque de paraitre sous un jour loin d’être parmi mes meilleurs. Je lui avais dit à la fin, comme ça, que j’aurais bien voulu la revoir, histoire d’essayer de reprendre contact, mais ma lettre était restée sans réponse (ce que je ne pouvais pas vraiment lui reprocher, étant donné ma propre lenteur à répondre). L’absence de réponse n’avait fait que concrétiser mes craintes : qu’elle trouve ma situation lamentable, qu’elle n’ait plus envie de me revoir, qu’elle ait trouvé le ton de la lettre trop personnel (ne m’étant pas contenté d’envoyer un “tout va bien” de rigueur émaillé de banalités), ou que sais-je encore. Le silence a ceci de terrible qu’il nous fait imaginer tout et n’importe quoi — en particulier les pires choses — mais un message de bonne année envoyé sur mon portable début janvier 2012 m’avait montré qu’elle ne m’avait pas oublié.

Il se trouvait que, il y a de cela une semaine, je pensais justement à elle quand — coïncidence troublante — j’ai reçu un message de sa part m’invitant à aller avec Anthony et Julie à une “nuit Tim Burton” organisée dans un cinéma parisien. Je ne sais pas pourquoi ils avaient pensé à moi comme ça, toujours est-il que j’ai spontanément eu le réflexe de dire oui, ce qui n’aurait peut-être pas été le cas il y a un an ou deux, mais du temps avait passé, j’avais sans douté évolué dans ma façon de voir les choses et j’étais à présent content de les revoir, je m’en voulais de ne pas leur avoir donné de nouvelles et je pensais qu’ainsi, je pourrais sans doute renouer avec eux, me rappelant les souvenirs d’il n’y a pas si longtemps. Cette impatience à les rencontrer était toutefois contrebalancée par une forte appréhension due au fait que je ne les avais pas vu depuis longtemps (mais je n’avais, de toute façon, vu personne d’autre de la prépa, de l’école d’ingénieurs ou autres), et que je me demandais ce que j’allais ressentir en les revoyant.
J’avais l’impression, de mon côté, d’avoir beaucoup évolué durant ces deux années sur ma façon de voir les choses, mon rapport au monde, la façon de sentir et d’analyser mon comportement, celui des autres et du monde alentour, comme si cette solitude en quelque sorte forcée et subie (même si personne d’autre que moi-même ne me l’étais imposée) m’avait obligé à prendre du recul, à creuser l’introspection, à affuter mon sens critique et ma capacité à analyser les choses alors même que durant ce temps, je m’étais paradoxalement coupé du monde ; comme si j’étais devenue un peu une autre personne dans ma façon de comprendre les choses, comme sorti d’un brouillard.

Si j’appréhendais quelque peu, c’est d’une part parce que j’avais le pressentiment (qui s’est finalement avéré faux) de subir comme une sorte de choc, comme lorsqu’on passe brutalement du froid au chaud, sauf que là, il se serait agi d’une sorte de passage brusque du passé au présent, d’une représentation idéalisée mentalement à sa concrétisation brutale. Il se trouve en effet que, comme je ne les avais pas vu depuis deux ans, l’image que je me faisais d’eux, associée à des événements passés et révolus, se trouvait comme coupée du présent, d’autant plus que j’avais l’impression de ne pas avoir vécu à 100 % ces moments passés — comme presque tous les moments passés, d’ailleurs — comme si ce que j’avais vécu appartenait à une autre vie. D’autre part, et c’est bien là ce qui motivait le plus mon appréhension, était le sentiment persistant et très lourd à porter de culpabilité, celui d’être jugé négativement, ici, en l’occurrence, parce que je n’avais rien fait depuis deux ans, alors que tous les autres gens de ma situation travaillent depuis longtemps. Toutefois, comme j’avais déjà averti Nina par lettre de ma situation ainsi que de mes états d’âme, je supposais qu’elle en avait déjà touché mot à Anthony et Julie et qu’ainsi, ce que je leur dirais ne leur apparaitrait pas comme une surprise.

(A suivre…)

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